Vous savez, malgré ma connaissance incommensurable et la modestie qui va avec, je ne suis pas encore une base de données ambulante, surtout quand il s’agit d’intra. Car oui, vous le savez ou non au hasard de mes épanchements, je suis un peu moins à l’aise avec les intras qu’avec les casques. Pas côté son, certainement pas, mais bien sur la partie confort, la sensation générale, l’impression plus grande d’enfermement et de pression sur le tympan (ce dernier point mériterait là-aussi un long article). En gros je me fatigue plus vite l’oreille et je suis toujours moins à l’aise. Pourtant je me suis penché relativement tôt sur le sujet, ayant possédé les premiers modèles grand publics qu’étaient les horribles Koss Plug, ou encore les références Etymotic ER6 et ER4, des Shure E4c et même, il y a pile dix ans, une paire très haut de gamme de Jh audio JH13 sur mesure, ainsi qu’un très grand nombre de références mais ma mémoire abdique. Et Periodic Audio ? Et bien oui, un peu, de manière très floue, il y a un ou deux ans avec le site headfi, mais sans avoir plus que ça accroché au nom plutôt passe-partout. Lancement récent en France, l’occasion de redécouvrir le nom et tester enfin le bouzin, les bouzins plutôt, car il s’agit ici de la gamme.
Présentation
Et oui c’est un triple test que je vous propose. Pas par paresse, ou alors seulement un peu, mais avant tout par logique. En effet, la gamme Periodic Audio actuelle se base sur un principe assez simple : une même enveloppe pour tous ses écouteurs, le reste venant d’une approche différente pour chaque membrane. Ainsi on retrouve à l’heure actuelle 3 modèles : Magnésium, Titanium et Beryllium, qui comme les noms respectifs l’indiquent possèdent une membrane en alliage de magnésium (96%), en Titane et en Béryllium. La présence de tel ou tel matériaux sur une membrane est souvent caractéristique d’une sonorité. Par exemple, la membrane biocellulose (laine) du Surface headphones donnait ce son rond et très peu étendu dans les aigus, les membranes titane donnent souvent une sonorité tranchante voire agressive, les béryllium (très haut de gamme) une excellente extension dans les aigus pour un son moins tranchant que les titane. Après, c’est une généralité, pas à graver dans le marbre, tout le reste est la petite recette des constructeurs et les spécificités du modèle.
Pour la petite histoire, Periodic Audio est né en 2016, récemment donc, avec un discours assez clair :
En gros « nos produits ne sont pas fait pour être jolis, fashion, ou portés par des stars. On se concentre sur le son et rien que le son ». Un discours qui me plait mais qui reste un discours marketing comme un autre, aucune marque ou presque ne va avouer « on fait surtout du design, balek le son ! ».
Le principe de la marque est clairement de s’articuler autour du tableau périodique, Mg, Ti, Be, et bientôt C pour Carbone, prévoyant un modèle avec membrane dans ce matériau. Ce dernier sera sans doute un revêtement type Carbone Amorphe (ou Diamon Like Coating en Anglais) annoncé sur le L5000 de audio-technica ou quelques références d’intra comme les Campfire Vega.
Pour simplifier ce comparatif/test des Periodic Audio, je précise que tous les points évoqués ici, hors qualité sonore, sont strictement identiques, la marque ne les différenciant que dans un petit signe sur la boite cartonnée ainsi que la couleur du dos des intras. Je mélangerai alors souvent les termes en disant Le ou Les Periodic Audio, ne vous en formalisez pas.
Pour rappel des prix :
- Periodic Audio Magnesium : 99 Euros
- Periodic Audio Titanium : 199 Euros
- Periodic Audio Beryllium : 299 Euros
Construction
Alors alors. Évacuons le premier point qui fâche, reproche faisant clairement l’unanimité dans les forums et chez les testeurs : le câble n’est pas détachable, quel que soit le modèle. Cela passait il y a quelques années oui, mais clairement plus en 2019 où le moindre modèle Chinois à 10 euros propose des connectiques 2 broches ou MMCX. D’autant plus triste sur le modèle Beryllium ou encore sur le prochain modèle Carbon prenant le même chemin. Les produits sont garantis 5 ans ce qui fait un peu passer la pilule, mais pour une réparation simple ou changement de câble pour un modèle supérieur (je suis clairement pas un adepte du câble aftermarket, mais quelques modèles peuvent donner un résultat légèrement meilleur pour pas trop cher). On peut pointer sa qualité moyenne. Difficile de savoir à la longue, mais celui-ci est vraiment classique, très fin, se terminant par un jack droit juste… honnête.
Passé le très gros bémol du câble, la qualité de l’écouteur en lui-même est plutôt bonne. Un corps en polycarbonate bien massif, et un dos en acier. L’ensemble est rigide, sans jeu, pas fou non plus mais sans problème apparent. A ces prix là (en tous cas pour les Ti et Be) existent déjà des intras tout métal, ou plus démontables/réparables, je ne vais donc pas non plus les citer, particulièrement le Be, comme de très bons modèles. On attend au moins ça pour ce niveau de prix.
Accessoires
Un intra ne peut pas venir avec une déferlante de petits gadgets, mais la marque fait pourtant bien le travail. Un boite de rangement façon range-cachous en métal, de bonne qualité, une prise avion, un convertisseur jack 3,5mm vers 6,35mm, et beaucoup d’embouts :
- 3 tailles d’embouts silicone simple (pour moi ce qui va donner le meilleur son)
- 3 tailles d’embouts silicone à « bi-flange »
- 3 tailles d’embouts mousse
Confort
Je l’ai déjà dit, les intra ne sont pas forcément ma tasse de thé. Mais je juge avant tout la bonne tenue dans l’oreille et l’impression immédiate, s’il ne pousse pas trop fort, s’il ne va pas trop loin, si la canule n’est pas démesurément large, etc…
Le format dit « bullet » de l’écouteur est ce qu’il y a de plus simple pour gérer un driver dynamique simple. Le confort est ainsi plutôt bon mais pas parfait non plus. Ça dépasse forcément un peu mais reste bien équilibré et se fait relativement oublier. Nous sommes tout de même pas au niveau des meilleurs universels, que ce soient les produit hérités du custom (type earsonics universel) ou même les produit plus compacts comme les Sennheiser IE800. Mes conduits auditifs sont petits, ce qui me force à mettre le plus petit embout, la canule se faisant alors toujours un peu sentir. De plus grands orifices [barrière anti-blagues] l’oublieront complètement, des oreilles comme les miennes ou plus petites garderont toujours cette sensation imparfaite.
Pour classer en ordre de préférence avec les embouts : Silicone simple > embout mousse > silisone biflange. Le silicone simple est le plus standard et clairement pensé pour le modèle (en tous cas pour le son), l’embout mousse est idéal pour ceux qui ne supporte pas le silicone, le biflange est pensé pour l’isolation, mais reste inférieur au mousse, le plus intrusif, et celui qui tient le moins des trois. Je ne l’ai qu’à peine utilisé.
On peut relever l’effet microphonique (bruit du câble se frottant au vêtement répercuté dans les oreilles), pas gigantesque mais notable, à la fois dépendant de la nature simple du câble mais également l’absence de passage de ce dernier derrière l’oreille (chose qui annule presque totalement l’effet).
Isolation
Un bon intra à l’ancienne, bien isolant surtout quand on utilise le bon embout. Pour faire simple, le silicone simple rend déjà une très bonne copie, les biflange isolent plus d’une manière générale, et les mousses font encore un peu mieux. Pour moi l’embout simple suffit car permet de largement oublier son environnement, bruyant ou non, et aucun des 2 autres ne peut faire vraiment mieux pour les bruits de plus basses fréquences (il faudra alors passer par l’isolation active).
Son
La marque nous a bien prévenu : c’est pour le son qu’il faut venir, rien d’autre, qu’on la laisse faire sur ce plan. Alors non, je ne fais pas confiance au discours d’une marque dont je n’ai jamais écouté un produit.
Ici je décomposerai les trois écoutes. La méthode d’écoute ? Mélange de comparatif direct et de test grandeur nature… c’est à dire sans me fatiguer l’oreille à la recherche de la moindre micro-différence, je l’embarque la journée et j’oublie que c’est ce modèle que je porte, aussi simple que ça. Pour l’écoute, tout s’est effectué via les embouts silicones simples, laissant la meilleure sonorité. Les embouts mousses ont toujours cette fâcheuse tendance à étouffer l’écoute, les intras (d’une manière générale) sont avant tout pensés, en terme de sonorité, pour les embouts silicone. Il existe également des modèles d’embouts aftermarket qui iront parfaitement avec les 3 modèles et pourront, cela est très possible, améliorer la sonorité et le confort. Pour cela, n’hésitez pas à passer sur des forums comme headfi pour vous tenir au courant.
Commençons par une généralité, applicable aux 3 modèles, nous sentons 2 choses :
- Signature en V (pic dans les basses/bas médium, puis petit creux et retour d’un pic dans les hauts médiums/aigus) pour tous les modèles, plus ou moins marquée et sans jamais franchir la limite du « mais où sont passées les voix » ou de la trop grande agressivité.
- On sent bien la patte du driver dynamique simple, dans ses qualités et ses défauts. Ainsi les trois modèles peuvent largement fonctionner sur une simple sortie de smartphones, mais vont clairement plus se réveiller avec un peu de patates, bon baladeur ou bon ampli. De même, le grain particulier et l’impact se ressentent, tout comme la séparation qui n’est pas aussi bonne que les bons modèles à drivers à armature.
Periodic Audio Magnesium
La marque les décrit comme « relativement neutre, mais avec des aigus plus clairs que les Be ».
Dans les faits, la signature parait en effet plutôt équilibré, en tous cas plutôt claire, mais on peut difficilement la qualifier de neutre. Les médiums sont un peu en retrait (signature), les voix peuvent ainsi paraître un peu lointaines, peu charpentées. On retrouve en ce sens tout sauf une impression de voile, elles restent claires et parfaitement définies.
Le modèle est presque sage, légèrement percutant avec une extension discrète dans les basses, de l’impact mais pas de rondeur. Rien ne s’effondre, mais le modèle est tout sauf chaud.
On retrouve une pointe marquée dans les haut-médiums/ débuts des aigus plutôt agréable tant que le morceau n’est pas trop embouteillé. Défaut des drivers dynamique ou de la membrane en elle-même, le modèle ne sépare pas suffisamment les détails pour les pistes très compliquées. Il se comporte extrêmement bien dans le classique, le jazz (si le côté plus neutre que chaud vous convient) ou autre styles vocaux un peu posés, particulièrement avec les voix féminines. Pour certains il sonnera trop sec. Pas agressif, juste un peu sec.
Trouve-t-on plus technique dans cette gamme de prix (99 euros) ? Oui, c’est évident. Mais on retrouve ce petit grain, ce petit impact très maîtrisé et ce plutôt bon niveau de détail. Le produit ne met pas sur le cul mais il fait un bon boulot sur ses styles de prédilection.
Periodic Audio Titanium
Clairement la plus agressive, la plus en V des trois. La marque annonce d’ailleurs la couleur en ce sens. Je suis moins fan de cette signature, se limitant toute seule à ses propres styles.
L’impact est clairement plus important, de même que l’extension dans les basses. En revanche, les voix sont plus en retrait et les pics d’aigus remontent encore. La signature fait néanmoins que le niveau de détails est un peu supérieur.
Malgré le prix, le Ti semble être un Magnesium sonnant différemment. Je ne dirais pas qu’il est une gamme au-dessus, seulement différent. Si le Magnesium brille dans les styles plus posés, les voix féminines, le Titanium a besoin de patate, d’énergie, de guitare saturées… et surtout du public adéquat. Heureusement il ne tombe pas dans un travers tel qu’il devient inécoutable (je ne citerai pas de marques). C’est modèle détaillé, précis, agressif, il ne faut pas lui demander autre chose que ce pourquoi il a été fait. Au moins la marque a été honnête.
C’est également le plus difficile à driver des trois, et celui qui bénéficie le plus d’un ampli un peu puissant. J’entends par puissant : autre chose qu’un smartphone de base. Car avec ses 96dB (bien qu’avec 32 Ohms, cela ne soit pas un gouffre), on retrouve une sensibilité bien faible pour un intra. Un bon baladeur le rend moins brouillon, plus percutant encore, un brin de contrôle en plus.
Periodic Audio Beryllium
Là… nous passons clairement un cap. Si le Magnesium et le Titanium peuvent se voir comme des frêres ennemis, le Be semble être un Mg ayant monté en gamme.
Pour faire simple, il est à la fois meilleur que les deux dans les basses et surtout dans les aigus. Sa gestion des basses est proche des Mg, tout en ayant un peu plus d’extension et en gardant l’impact du Ti.
Le modèle sonne plus chaud mais également plus riche que les deux autres côté médiums. Les voix sont proches de ce qu’on retrouve avec les Mg (les Ti étant carrément dans les cordes), avec plus de nuances, plus de petits détails, un peu plus de corps.
Côté aigus, le modèle est le plus…. timide des trois. On retrouve clairement des pointes dans les hauts-médiums, mais pas aussi marqués que sur le Ti ou même le Mg. Cela donne un côté un peu plus passe partout. En revanche, on remarque plus d’extension, il y a clairement une vie passée les 10Khz, l’aération est meilleure, la séparation des instruments est également très bonnes. C’est sans doute dans ce registre que la membrane Béryllium tire le plus son épingle du jeu. Periodic Audio a réussi un modèle clairement pas timide dans le registre mais pas agressif, très qualitatif même, proche de ce qu’on retrouve avec les armature symétrique tout en gardant le grain particulier du driver dynamique.
Paradoxalement, c’est le plus audiophile mais aussi et le plus accessible (musicalement) des trois. Il est à la fois plus technique et plus rond, plus joueur que les 2 autres, bien plus complet sur l’ensemble des styles. Enfin, il gagne également beaucoup en qualité suivant la source. Sa marge de manœuvre est assez grande et, alimenter sur une source détaillée et pas trop froide, il fera bien mieux que sur un smartphone.
Pour qui ?
- Le Mg peut se voir comme une fausse entrée de gamme (99 euros reste une somme). Un modèle relativement complet mais qui ne fera pas de miracle dans les pistes trop chargées. Il ne s’effondre pas mais ne va pas se battre contre les armature symétrique de ce niveau de prix à ce jeu là. Malgré ses limites, sa clarté, sa bonne aération du son et son grain en font un modèle à recommander pour ses moins de 100 euros.
- Le Ti est a réservé aux amoureux de la signature en V, difficilement aux autres. Tranchant voire agressif, il n’est pas fondamentalement meilleur que le Mg malgré son tarif double. Sans doute le moins intéressant des 3, surtout face aux concurrents. Pourtant, il en garde un peu sous la pédale avec une bonne source.
- Le Be est, malgré son prix, le modèle que je conseillerai en premier, car se permet de combiner les qualités du driver dynamique en ne lâchant pas des yeux les armatures symétriques. Un modèle légèrement chaud, puissant, avec de l’impact, tout en gardant une bonne gestion des détails et une très bonne qualité des aigus. Pas forcément un tueur à ce prix car les concurrent sont trop nombreux, mais un modèle particulièrement riche et accessible musicalement, difficile de voir un driver dynamique de sa gamme aussi intéressant.
Conclusion
Des défauts, mais principalement externe. La gamme Periodic Audio a clairement du retard côté câblage. Dommage, car sa promesse de modèles presque taillés sur mesure pour tel ou tel style est globalement réussie. Un Beryllium faisant figure de bon haut de gamme, sans doute plus intéressant qu’un Sennheiser IE800 équivalent, un Magnesium étonnamment clair et riche pour sa gamme de prix, tous les deux sont particulièrement à souligner. Reste le Titane, que je conseillerai uniquement aux mordus de la signature en V, maîtrisée mais tout de même très typée pas forcément plus qualitatif que le Magnesium.
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