Casque Hifi

Dan Clark Stealth : pour mon futur compte en banque

écrit par audio du village

Vous le savez, ou ne le savez pas, j’ai des gouts simples. Le côté extrêmement péteux de bien des audiophiles me parle, puisque je suis tombé dans cette marmite quand j’étais petit. Mais dieu merci je m’en suis sorti, et je peux décemment vomir sur le genre de phrases type « ouais mais à moins de 1 000 Euros un DAC et un ampli ça fait pas de la musique mais du bruit » (phrase que j’ai déjà entendu et lu). Ainsi j’ai délaissé depuis longtemps le côté audiophile et ses supers pouvoir basés sur son insurpassable ouïe exempte de tout effet placebo (c’est ironique), pour prendre déjà du plaisir avec de simples écouteurs à quelques piastres.

Mais bon, on peut jouir des plaisirs simples, et ne pas pourtant vouloir faire partie des manants de votre espèce. Ainsi, lorsque le Meze Empyrean (trop cher pour moi), et quelques années avant le HD800 de Sennheiser (que j’ai déjà possédé) me sont tombés dans le mains, je n’ai pas boudé mon plaisir, bien au contraire. Mes oreilles pouvaient enfin se nourrir de casques innovants, vraiment bien étudiés sur le fond et sur la forme. Je n’ai rien contre les casques Audeze, Final Audio (enfin si, ce sont souvent des bouses en V inécoutables, sauf l’excellent D8000) ou Abyss, mais l’ergonomie d’une tringle à rideau montée avec des haut-parleurs me donne toujours l’impression d’un foutage de gueule dans les règles de l’art.

Et puis je suis tombé il y a quelques jours sur l’annonce du dernier casque fermé de la marque Dan Clark, le Stealth. Et enfin, j’ai eu l’impression de voir un produit maitrisé de A à Z, innovant, mais surtout ne balançant pas simplement des poncifs vagues dont l’industrie audio a le secret. Ici, l’idée est d’exploiter des avancées techniques bien réelles et mesurables, à travers l’utilisation de métamatériaux et d’impression 3D. En somme, on ne se base plus sur une simple coque taillée en escalier, ou un intérieur bourré de mousse plus ou moins au jugé. Oubliez ça, la qualité de l’amortissement est une donnée mesurable, c’est ce qu’a fait Dan Clark, qui ne s’est pas reposé sur un simple empirisme « ça a l’air de bien sonner ».

Ouais ça me titille

On va commencer par ce qui fâche le plus, le prix : 4 000 BOULES. Peu importe ou presque la techno, 4 000 Euros pour un casque de technologie planaire (technologie à membrane plate intégrant sa bobine sous forme de film plat) est clairement trop cher. Allez, on va dire que c’est le prix de l’innovation, ou plutôt de la recherche et du tâtonnement sur le produit. C’est ce tarif qui fait que, clairement, ce n’est pas demain la veille que je pourrais me le prendre.

Passée cette frustration de pécore, pas mal de choses me donne des fourmillements dans le pantalon. Premièrement, la structure (dérivée d’anciens modèles) ressemble à quelque chose, même si n’est clairemenr pas un sommet d’ergonomie. Le casque déploie un bandeau élastique assez large, est assez léger pour du planaire(autour des 400 g), cela grâce à l’utilisation d’un arceau/branche en alliage de titane (très fin). J’aime particulièrement les coques en alu usiné ajouré, le tout avec une anodisation noire matte qui donne un aspect vraiment classieux. Je suis pas partisan de l’absence de couleur, et encore moins de la mode des « couleurs sans couleur » très scandinave qu’a démocratisé Apple (couleur bleu-gris, vert-gris, rose-gris, etc), mais ici cela donne un vrai cachet.

Le plus impressionnant ? L’arrière des coques en fibre de carbone. Là encore, il y a certain dosage, on n’est pas dans le festival du tuning.

Bon c’est bien beau, mais la technique dans tout ça ? Sur le papier, bien que cela soit contre-intuitif, le meilleur son potentiel vient forcément d’architecture fermée. Pourquoi ? Parce qu’il est possible d’avoir totalement la main sur la « chambre acoustique ». C’est comme si vous aviez la maitrise totale d’une pièce d’écoute, comme si vous étiez libre de modifier tous les éléments. En pratique, gérer efficacement un casque planaire fermé est une tannée. Audeze y arrive plutôt bien, mais au prix de volumes délirants, et de coussinets trop larges. Surtout, j’aime bien le LCD2 fermé et ses 650 g, mais je tiens à mes cervicales. C’est pourquoi il est souvent plus facile de construire un modèle ouvert, qui évite énormément de problèmes.

C’est là que le Dan Clark Stealth entre en jeu. Déjà, il y a le haut-parleur/transducteur, baptisé V-planar. Ce modèle de 62 mm x 34 mm (ce qui n’est pas très grand pour du planaire) possède deux particularités. Premièrement la structure de sa membrane, pas totalement plane mais légèrement plissée en accordéon. Cela permet de tous simplement augmenter la surface, et pas conséquent le déplacement d’air. Mais surtout, le constructeur n’a pas placé un réseau d’aimant de chaque côté (ce qui se fait dans la majorité des cas), mais d’un seul.

On reviendra peut-être un jour sur le fonctionnement d’un HP planaire, mais l’interaction magnétique est créée grâce à aux aimants placés sur un même côté, et non entre deux réseaux d’aimants placés d’un côté et de l’autre de la membrane. Dans le cas d’un réseau placé de chaque côté, cela va simplement améliorer la sensibilité de l’ensemble, et plus facilement uniformiser le champ magnétique (même si ce point n’est plus un problème).

Bref, une fois cette bonne base posée, la marque place un nouvel élément à son cul : sa structure AMTS (Acoustic Metamaterial Tuning System), ou « Système de réglage par métamatériau acoustique ». Un métamatériau est un matériau créé artificiellement, dont les propriétés ondulatoires n’existe pas ailleurs. En somme, une sorte d’élément futuriste dont les possibilités assez larges permettent d’ouvrir bien des champs.

La plupart des métamatériaux sont étudiés dans les domaines des ondes électromagnétiques ou électriques, mais d’autres le sont dans le domaine mécaniques (les ondes sonores en sont). En partant sur un tel matériau, Dans Stark a créé une structure complexe, imprimé en 3D, permettant de combiner plusieurs types de structures en une. En gros, au lieu de vainement faire rentrer des diffuseurs (contre les ondes stationnaires), des résonnateurs de Helmholtz (bass trap ou contrôle des médiums) et des résonateurs quart-d’onde (sorte de filtres sur des gamme de fréquences précises), tout est présent dans une même structure, de manière plus efficace que les objets habituellement utilisés.

Le fameux métamatériau

Je ne l’ai pas sous la main, je ne peux donc pas donner mon avis sur l’efficacité, mais cela semble plus que réussit d’après les premiers avis et, surtout, les premières mesures.

Dan Clark Stealth et Kef LS50 II, même combat ?

J’aime la science pour ce qu’elle peut apporter dans le domaine acoustique. On oublie trop souvent, dans le milieu de l’audio, qu’il faut composer avec. Cet univers est trop souvent la proie à du vague ressenti, à des innovations qui n’en ont que le nom, voire à du charlatanisme pur et simple. Combien de marques déposent des brevets pour des choses totalement risibles (du genre changer une vis dans les entretoises d’une enceinte) en faisant payer au prix fort un semblant de changement. L’audio est trop souvent comme ça, un univers dans lequel un utilisateur a l’impression d’avancer, de changer, de se rapprocher à chaque fois du graal sonore, alors qu’il ne fait que tourner en rond et répéter des cycles à grands coups de gadgets.

Cela rappelle un peu l’audiophile qui se met aux câbles numériques chers (et inutiles) et a l’impression d’avancer, puis aux switch audiophiles (encore plus con) et a l’impression d’avancer, puis aux coupelles résonnatrices et à l’impression d’avancer, puis… toujours dans des techno qui n’ont jamais rien prouvé, mais « j’entends donc ça marche ». Dans le cadre des métamatériaux, l’avancée est réelle, car peut se prouver, se mesurer, se quantifier, et forcément s’entendre (ce qui reste la base).

Autre utilisation de métamatériau, par Kef, ici utilisé à l’arrière du tweeter (techno MAT)

Des dizaines d’années à nous fader des mousses placées de manière plus ou moins approximatives par les fabricants, qui opposent systématiquement l’écoute (qui serait « la seule chose importante ») et la mesure (qui « n’est pas assez précises pour les subtilités »), et nous tenons peut-être un futur raisonnable. Ce n’est pas une surprise de voir Kef, dont les ingénieurs sont vraiment dans les plus compétents de l’industrie, être parmi les premiers à adopter les métamatériaux sur ses excellentes LS50 II. Dan Clark a visiblement fait le même travail vraiment sérieux, en exploitant une technologie nouvelle et ayant entrevu ses immenses possibilités. Way to go.

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